mardi 13 novembre 2018

RENAISSANCE


                                       À Armanda

On n'a pas toujours le choix
Quand sous le poids de sa croix
On se bâtit de pâles attitudes
Pour ne pas ressentir la servitude.
L'on croise d'affolées solitudes
On se vante de quelque habitude
Alors que du haut œil nous voit
découper les ailes de la foi.


Qui veut se faire des loisirs
Devrait dans son orgueil moisir
Avant de se dire prêt à choisir.


Ne vivons guère par la guerre
Car tout fruit qui luit
Est le produit
D'une pluie qui fuit.


Parler c’est saler ses symboles

Brodés par la parole

Comme aimer c’est se méprendre

 à l’achat  d’un cœur à prendre.



Les ombres tombent sur toi

Mes songes comblent ma foi.

                           In l’Échappatoire 

PROMO SPORT

Jean Landry BASSILEKIN: L'avant-centre Camerounais


EXCLUSIF

L'histoire renaît de son passé!

                Le Cameroun réclame les grands sportifs, et certains se demandent ce que les auteurs de rêves sont devenus...

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EWANE: "Le football est ma vision"


J'AI EU LE COURAGE




J’ai eu le courage de penser
Penser pour un jour exister
Exister pour un jour servir
Servir pour toujours sauver
Sauver une cause noble
J’ai eu le courage de parler
Parler aux peuples des défis
Des défis de ce siècle à relever
Ce siècle vendu aux enchères de l’oubli
L’oubli qui génère l’ignorance et l’indolence
L’indolence de cette jeunesse torchée à la torpeur
La torpeur d’un pays purgé de confusion et de distorsion morale
J’ai eu le courage de rire des menteurs qui mettent des souliers de pèlerins
Pèlerins léthargiques du crépuscule et hommes aux manières injustes et lâches
J’ai eu, moi, le courage de parler de foi en premier pour exposer la loi par la suite
Cette loi qui chaque fois fait des choix arbitraires et alourdit la croix des sans voix
 Moi, J’ai eu le courage de dire que Dieu n’a pas de mère et qu’il est son propre père
Un père à tous et pour tous que les théories et les fortes doctrines peignent à souhait
J’ai eu le courage                               Le courage que nos défunts pères eurent jadis
J’ai eu le courage                               Le courage de prendre le pas des bons pèlerins

                                                                   Arnaud BAKELAK  in l'Echappatoire








MATERNAGE


                                                Octobre 2015
                                                A Véronique…

Que de mots dans l’ombre du vide qui m’accable
Que de maux le long du cordon qui à toi me câble
Que de trots autour d’une pensée fort agaçante
Celle de t'avoir toujours comme mère agissante
A force d’attendre l’arrivée du train de la quiétude
Éternisé à paginer les semaines de mes habitudes
Comme les pages d’un livre d’alchimie
Je ne distingue plus le lundi du mardi
Le mercredi ou le dimanche du jeudi
Et mes souvenirs sur moi se penchent
Mère au cœur de miel
Mer aux mœurs du ciel!
De mémoire et de faits,
Oh, joli soleil de mai
Je sais que tu sais...

Qu’on ne peut pas être bon
Pour l’unique voix de la solitude
Qu’on ne peut tourner en rond
Sans jamais colorer son habitude
Tu sais qu’on ne le peut pas
Qu’on ne peut vendre ses pas
Aux éternelles enchères du hasard
Aux perpétuelles folies des lascars
Tu sais qu’on ne peut chanter d’une vie
Sans cueillir des mots à une autre
Joli Soleil de mai
Je sais que tu le sais

Qu’on ne vente pas ses envies
Sans dessiner celles des apôtres


Et ta voix clame le ton d’un rêve
Et de ce rêve ton nom s’élève.
Jadis je te suivis
Toi au front qui luit
Loin de toi je vis
Près de toi je suis.



Arnaud BAKELAK, in  l’Échappatoire





PARCOURS


                               A  Zarawou...

Dans un village de cruels sourds
Quand s’arrêta mon parcours
De ma faible voix aspirante
Je rêvai de la phrase soupirante

Et sur les cimes de montagnes maries
Par-dessus les volcans affranchis
Les vautours d’un regard trop jaloux
Attendaient qu’on eût tranché un cou

Je déployai de ma gorge mon cri
J’appelai à l’aide de loin et d’ici
Et bientôt mon souffle s’évanouissait
Quand sur mes flancs mes bras s’écrasaient
L’amour avait disparu par ces élans de méprise
Le temps marquait son tempo dans une même reprise

Des regards peignaient la tristesse et la violence
J’ai cherché dans la nue les traits de ton visage
Et j’ai paginé à la course le livre de l’espérance
Dans ce désert fleuri d’angoisse et de mirages
La douce et chaude brise m’a rappelé ta voix
Trébuchant  dans ma course, j’ai revu ta joie
Et tes yeux princiers et tes lèvres d’impératrice
Et ta peau de berceuse et tes cheveux bien lisses

Je t’attendrai dans le brouillard de mon souhait 

                                   in l'échappatoire, 2016  


                                  ARNAUD  BAKELAK

VISAGE D'AFRIQUE

Recueil de poèmes

Auteur: Arnaud BAKELAK

Contenu: 20 poèmes.





















 Extrait.

"Visage d'Afrique"

Des Mômes qui rient
Le long d’une route boueuse
Des mères qui prient
Rêvant d’une vie heureuse
Une rue pâle et sale aux vieilles sandales
Un peuple loyal égal portant le saint Graal
Ce monde sans réplique
Cette terre qu’est l’Afrique
Cette forêt de mères et de pères
De fils et de filles qui espèrent
D’une neuve et favorable vie
Par une aube révoltée et marrie
Des hommes costaux tout muets
Des idées blanches sous le fouet
Des mères qui sans cesse prient
Des mômes ignorants qui rient
Une ville aliénée, acculturée
Une cité muette qui parlera
Au bout d’un rêve rénové
De ses bras robustes et pacifiques
De sa foi naturelle et prolifique
Des jeunes aux yeux grands
Des cœurs aux vœux francs
Un peuple de têtes bien faites
Un monde de bras honnêtes
C’est ça l’image de mon Afrique!

                    Arnaud BAKELAK, in L’Échappatoire 

CRIME CONTRE LE BON SENS

Quand humilité et humanité ne riment pas ensemble, tout devient humiliation !

Nous sommes entre les murs d’une époque, titre annoncé par Arnaud BAKELAK, entourés de grands yeux tout à fait formés dans le contrôle systématique des « mouvements d’humeur » et des « courants de rumeurs ».  Très proches de ces yeux robotisés, on peut voir de gros bras surentraînés dans le massacre des vies et l’anéantissement des libertés. Et si vous me posez la question, celle de savoir à quel siècle se déroule ce film très célèbre, je vous brandirai le calendrier de 2017, année baptisé comme les précédentes, « an de grâce ».
            Ne me demandez donc pas où a lieu le tournage de ce « fameux » film. C’est bien dans « notre pays ». Ce cher « pays » vendu aux enchères de la honte, tirant sa réputation de ceci qu’on y fait de la norme un écart, et de l’écart une norme. 
              Dans cette partie de l’Afrique centrale, les principes relationnels entre riches et pauvres exigent non pas d’user de la force des arguments, mais de laisser libre cours à chaque occasion aux arguments de la force, qui généralement sont déployés au détriment des «du bas-peuple».
            Chez nous, rien n’est normal, sauf la contre-norme. C’est à ce titre que la morale a foutu le camp en cédant sa place à la mauvaise foi et à l’incivisme. Si vous êtes en visite chez nous, ne vous étonnez surtout pas de ce que vous verrez et entendrez dans nos rues. Ici, en pleine capitale, quelques hommes bien sapés se soulagent sur le gazon d’un jardin public ; là, pas très loin, un conducteur de taxi arrose d'insultes une digne femme qui lui a demandé de serrer à droite au moment de transporter son client ; plus loin, un homme vêtu d'une veste menace un commerçant ambulant d'emprisonnement directe parce que la tomate de ce dernier s'est accidentellement déversée sur le capot de sa Mercédès Compressor. Et ce n’est pas tout.
            Chez nous, l’argent et le pouvoir sont les gages d’une vie certaine, même si ces derniers représentent véritablement des armes d’anéantissement de certaines vies. La preuve, regardez-les passer dans ces coins convoités de la place ! Restaurants, snack-bars, hôtels, etc. Ils ont l’air rassurés, la mort n’existe pas pour eux. A un bonjour occasionnel à eux adressé, ces gens vous envoient un regard de réduction et de suspicion. Ils sont au téléphone avec un ton d’autorité, même quand il s’agit de demander simplement au mécanicien quand la réparation du véhicule sera achevée. Pour ces gens-là, Dieu n’existe pas, et ne leur demandez surtout pas de se repentir de leurs fautes. Ils vous diront que la faute vous revient pour être né « pauvre ».
            Chez nous, soyez malade et rendez-vous dans un hôpital public. Hum, si vous êtes piéton du genre apparence douteuse, tenue vestimentaire quelconque, mine de désespoir, l’ignorance et le dédain seront votre plat d’entrée. Bien plus, si vous venez à mettre au monde un bébé dans un de ces centres hospitaliers, la probabilité du vol de votre enfant et celle de votre mort ou de la sienne n’est pas à négliger. Dans ces lieux-là, l’accouchement par césarienne peut vous être imposé pour des raisons secrètement pécuniaires.
            Je disais donc que chez nous, ce qui est admis c’est l’anti-norme. Aucun service n’est dû aux usagers, excepté le service du mépris et de l’arrogance à leur endroit. Dans les ministères, personne ne vous dira exactement la démarche sûre à suivre pour faire aboutir un dossier de rappel, de prise en charge ou d’avancement. Tout le monde le sait curieusement, que pour tel service ou tel autre mérité, il faut céder tel pourcentage de votre « net à percevoir ». Ici, Tout est opaque, tout est flou selon l’expression saisie de tous. Je tiens à le dire, en fait, la situation est même très grave !
            Chez nous, certains hommes d'églises sont en « mission spéciale » ! Ces gars s’acharnent avec instinct de chasseurs sur les adolescents qu’ils sodomisent diaboliquement et avec frénésie. N’essayez pas de les dénoncer. Non ! Surtout pas. Ce sont les partenaires des institutions et des hommes « exceptionnellement puissants». C’est pour ainsi dire qu’ils sont forts et intouchables au sens propre et au sens figuré.
Chez nous, le citoyen est la chose qui peut soucier le moins le gouvernement. On ne vaut rien quand on est de cette fameuse nationalité. On peut mieux accorder du respect à un chien d’enclos qu’à un futile être originaire de cette terre. Ici, l’expatrié passe avant le citoyen. Déposez une plainte dans un commissariat contre un expatrié, vous verrez sans étonnement que le gars aura très vite gain de cause, car dit-on, « nous sommes un peuple de paix ».
Chez nous, les soldats et les policiers n’ont pas le devoir de protéger la masse, leur rôle c’est d’attendre le moindre soulèvement et d’obéir aux ordres qui supposent généralement une bastonnade légendaire, une arrestation immédiate ou un effacement réel. Et cela n’inquiète personne, cela ne fait de mal à personne ! 
Sommes-nous donc  juste des créatures ayant échoué dans l’aire de l’humanité sans pour autant en faire partie ? N’est-ce pas à ce moment que la question de la dignité humaine devrait surgir dans nos consciences ? Ce pays médite-t-il encore sur son nom de nation? Avons-nous tous la même conception de notre pays? sommes-nous réellement tous des patriotes? Que de questions traumatisantes qui se bousculent dans les cervelles encore vivantes. La conscience positive de notre histoire est-elle simplement un leurre?
L’humanité dans notre pays a pris des distances vis-à-vis de l’humilité. Nous sommes humains visiblement, mais  à s’en tenir à nos habitudes, la société des moutons est à envier à la nôtre. Vivement que nous sortions de notre torpeur!
                
                                                                 Arnaud BAKELAK, Peuple sans carnet, 2017.


QU'EST-CE QUE LA LITTERATURE?

Arnaud BAKELAK

La littérature est un art

                   La littérature est l’un des multiples domaines de l’art. Il est important de rappeler à l’élève ou à l’étudiant qui aborde plus ou moins fréquemment cette discipline que celle-ci a connu et continue de connaître des points de divergence au sein de la grande famille qu’elle forme. A la question de savoir ce qui est à l’origine de ces problèmes, la réponse ne coule pas de source. En effet, les œuvres littéraires posent des préoccupations relatives à leur fonction sociale, à leur capacité de changer le monde, à la source d’inspiration des écrivains, mais également  à leur actualité.

    
LES PROBLÈMES QUI DÉCOULENT DE LA LITTÉRATURE


            Parmi les problèmes qui se posent en littérature, l’on peut citer celui du rôle, c’est-à-dire le but ou la fonction des livres. De cette question première, de nouvelles préoccupations naîtront. Nous évoquerons entre autres la question de l’efficacité des œuvres d’art, le problème de la création littéraire, mais aussi celui de l’actualité des livres. Tout part cependant de ce que certains considèrent l’art comme une activité n’ayant aucune visée utilitaire, sociale, mercantile (commerciale). KANT  fera par exemple de l’art « une activité en elle-même agréable, une sorte de jeu ».


               De ce point de vue, l’art pour l’art par opposition à la technique est l’art pour sa propre finalité, son propre but, sa propre raison d’être.



I-LE RÔLE DE LA LITTÉRATURE



1-L’ECOLE  DE  PARNASSE: L’ART POUR LE DIVERTISSEMENT


            A cette question sur la finalité de l’art, on a historiquement assisté à une polémique. En effet, l’École  de  PARNASSE avec pour chef de file Théophile GAUTIER (français), élaborera la théorie de l’art pour l’art. L’art selon les parnassiens se dénature en voulant servir des causes utiles. Ainsi, GAUTIER affirmera de manière péremptoire qu’ « il n’y a de vraiment beau que ce qui ne peut servir à rien. Tout ce qui est utile est laid ». C’est donc dire que l’art ne peut garder sa valeur, son originalité et son essence qu’en se distançant de tout engagement d’ordre social, humain ou utilitaire. L’artiste est pour ainsi dire selon l’avis des parnassiens, le serviteur du beau au moyen de l’imagination, par le génie de son style, la magie de son verbe, par la puissance de son langage, et ce ni plus ni moins.

            Mais cette opinion ne fera pas l’unanimité au fil du temps parmi les adeptes de l’art en général et ceux de la LITTÉRATURE en particulier.



2-L’ENGAGEMENT : L’ART POUR LE PROGRÈS
            Dès la fin du 19ème siècle, l’on assiste à un ébranlement des fondements de l’art pour l’art, du fait de la naissance d’un courant littéraire dénommé ENGAGEMENT. Victor HUGO (1802-1885), Jean Paul SARTRE (1905-1980), Albert CAMUS (1913-1960) et bien d’autres encore dénonceront l’indifférence de l’artiste, voire sa démission devant ses responsabilités sociales. Selon ces derniers, parce que l’artiste est un homme vivant parmi les hommes, parce qu’il est interpellé par les nombreux défis à relever de son temps, le non engagement devient une absurdité, une preuve de lâcheté. Ne pas s’engager, dira SARTRE, c’est encore s’engager. C’est précisément s’engager de ne pas s’engager. Ainsi, le non-engagement porte le signe du négatif, il est le signe de la trahison de la conscience du littéraire, de l’homme instruit, et celle de son peuple. Et plutôt qu’un tel engagement, SARTRE propose un engagement positif, conscient, volontaire et responsable de l’artiste. A quoi doit donc s’engager l’artiste ? Écoutons Victor HUGO : « le poète est le guide, le mage, celui qui en des jours impies apporte des jours meilleurs ». L’artiste s’engage pour construire, instruire son peuple, pour être le pédagogue de ses contemporains. Et Léopold SEDAR SENGHOR de dire dans Hosties Noires: « Notre noblesse est non de dominer notre peuple, mais d’être son rythme et  son cœur (…) non d’être  la tête  du peuple,  mais  sa  bouche  et  sa trompette ». L’artiste s’engage aussi à éveiller les consciences endormies, à susciter des élans de révolutions dans le sens de la construction. Il peut ainsi s’engager pour apporter du réconfort. Il s’engage donc pour l’homme, et c’est pourquoi il dénonce les injustices, décrie l’arbitraire, combat les maux tels l’exploitation de l’homme par l’homme. L’engagement littéraire aboutit à la thèse d’après laquelle l’artiste doit se réconcilier avec la vie en plaçant son œuvre au centre des préoccupations humaines, car l’expression du beau n’est pas en soi (nécessairement) incompatible (opposée)  avec l’affirmation de l’utile du social et de l’humain. Faire l’utile en faisant le beau, telle est la nouvelle vocation que l’Engagement littéraire assigne à l’artiste. Il s’agit à cet effet de joindre l’utile à l’agréable afin de restaurer un équilibre à deux tendances : plaire et interpeller. N’est-ce pas en tout cas dans l’idée de rappeler à ses collègues écrivains l’essentiel de leurs activités qu’Albert CAMUS affirmait avec force : « notre métier d’écrivains s’enracinera toujours dans deux engagements difficiles à maintenir : le refus de mentir sur ce qu’on sait et la résistance à l’oppression ». Il ajouterait même volontiers : « Il n’y a pas de littérature engagée, il n’y a que d’écrivains engagés comme hommes et comme artistes, à s’efforcer de penser juste, peindre vrai et dire bellement ». Comme pour vibrer en phase avec Marcel ARTHAUD qui clamera tout haut : « je ne conçois pas de littérature sans éthique ».

            Mais s’étant insurgée contre le point de vue parnassien, l’Engagement ne restera pas à l’abri des critiques et condamnations trouvant leur raison d’être dans trois choses essentielles.



II- L’EFFICACITÉ DES ŒUVRES LITTÉRAIRES



             1-L’INCAPACITÉ DES LIVRES À TRANSFORMER DIRECTEMENT LE MONDE

            L’art en s’engageant peut-il changer le monde, c’est-à-dire transformer les hommes ou résoudre de manière effective les problèmes de la société ? Là est clairement posée la question de l’efficacité de l’art (et particulièrement de la littérature). La critique et la dénonciation ont-elles une influence, un effet direct sur la réalité au point de provoquer la révolution, c’est-à-dire la transformation substantielle et totale des mœurs ou du groupe social ? Certains dénonceront l’engagement comme inefficace et lui préféreront des procédés tels  que les manifestations plus ou moins violentes. Pour ceux-là, on ne fait pas la révolution avec les mots, mais avec les armes. C’est d’ailleurs l’avis de Henri LEFEBRE qui affirme que « la littérature ne peut pas apporter le salut parce qu’elle a besoin elle-même d’être sauvée ». De ce point de vue, les artistes, pourquoi en faire ? Certainement pour amuser la galerie, divertir les foules, peut-être dans tous les cas, mais rien de positif. 

2-L’INCONTESTABLE  POUVOIR  DE  LA  LITTÉRATURE

            A l’heure des modes de vie précaires, des mouvements de déstabilisation de l’honneur humain, l’artiste croit en l’art, en sa capacité d’influencer positivement le progrès social. Comment nier la force de la littérature lorsque nous connaissons le pouvoir des mots, la puissance de la parole telle que précisée dans la Bible en début du premier chapitre du livre de Jean: « Au commencement était la parole… et rien de ce qui fut créé ne le fut sans elle.» ? Aimé CESAIRE des années avant nous, comparait déjà la poésie à un pistolet chargé dont les vers sont des balles. De l’avis de cet auteur, le poète par la force de ses mots, la puissance de ses vers, peut remplir le rôle de transformateur des mœurs. La littérature peut travailler à l’éveil des consciences, elle peut réveiller les esprits endormis, ou sortir un peuple de sa léthargie (torpeur, profond sommeil)  et lui redonner confiance en lui-même et en l’avenir. C’est sans doute dans ce courant d’objectifs que s’inscrit l’ouvrage Cahier d’un Retour au Pays Natal. Dans ce livre, Aimé CESAIRE revalorise la négritude (appartenance à la race noire) et invite les siens à se tenir debout, à déserter l’indolence (paresse) et le complexe d’infériorité pour assumer leur destin de noirs. A partir de cet exemple, nous pouvons dire que l’art est capable de combattre les injustices et faire preuve d’humanité. De ce point de vue, l’artiste devient la conscience de son peuple et de son époque, le porte-parole des sans voix. Et CESAIRE de dire : « Ma bouche sera la bouche des malheurs qui n’ont point de bouche et ma voix la liberté de celles qui s’affaissent au cachot du désespoir ». Bien plus, parce que l’homme est aussi un être d’aspiration, un être de sensibilité en quête de bien être et de valeurs esthétiques, il peut trouver en l’art en tant qu’expression du beau un bréviaire (une source de ravitaillement, de satisfaction). ALAIN le disait si bien dans Système des beaux arts : « le beau ne fleurit que sur l’utile, jusque dans la poésie où la mesure et la rime eurent d’abord pour fin de servir la mémoire ». L’art en tant qu’expression du beau peut consoler, émouvoir, susciter de la contemplation ou de l’admiration. C’est dire que l’art tout comme les autres activités de l’homme peut participer au progrès de l’humanité, même si l’artiste ne saurait se substituer à l’ingénieur ou à l’artisan. Ceux-ci travaillent sur la matière, l’artiste travaille sur les mentalités, sur les esprits et les consciences. Son œuvre n’est pas pragmatiste, mais n’en demeure pas moins efficace. D’ailleurs, la révolution française ne porte-t-elle pas l’estampille des écrivains français qui par leurs œuvres ont pu éveiller les consciences et combattre la monarchie absolue ? 

III-L’ACTUALITÉ DES ŒUVRES LITTÉRAIRES


           1-LE LIVRE LIMITÉ DANS L’ESPACE ET LE TEMPS

               

L’autre critique faite à l’Engagement est qu’il tue l’art en tuant l’esthétique, en sacrifiant la recherche du beau au bénéfice des combats à mener. Disons-le de manière sommaire, l’art peut aligner le souci du beau à l’exigence du vrai. L’art peut penser juste, vrai, mais aussi bellement.

            Enfin, il est reproché à l’Engagement de créer des œuvres de circonstance, des œuvres qui militent pour des causes limitées dans l’espace et dans le temps. Or de l’avis de Paul VALERY, l’œuvre d’art doit résister à l’usure et aux intempéries du temps, c’est-à-dire accéder à l’universalité et à l’atemporalité. Ainsi pense-t-il : « l’art opère dans l’éternel et s’avilit à vouloir servir fût-ce la plus noble des causes ».

            Mais de ce qu’une œuvre serve une cause, s’en suit-il nécessairement qu’elle perde son universalité ? Son immortalité ? L’œuvre engagée est-elle toujours caduque, dépassée du seul fait de son engagement ?




            2-L’UNIVERSALITÉ ET L’ATEMPORALITÉ DES PRODUCTIONS LITTERAIRES



            Victor HUGO répond. L’œuvre engagée en parlant de l’homme et de ses conditions à travers les diverses circonstances de la vie, parle de l’homme en général. A ce titre, il affirme : « Quand je vous parle de moi, je vous parle de vous. Oh, ignorant qui pense que je ne suis pas toi ». Dénoncer la malhonnêteté au Cameroun c’est la combattre indirectement partout où elle existe, et, rappelons-le, la condition humaine est une et universelle. En combattant la discrimination raciale en Amérique, l’écrivain la décrie partout où elle règne, quelque soit l’époque qu’elle influence. C’est donc dire que l’œuvre engagée peut survivre à son temps, demeurer actuelle aussi longtemps que les problèmes qu’elle pose persistent, ici ou ailleurs. En fait, quand bien même l’artiste s’engage à dénoncer les maux et injustices, il use toujours d’un style, d’une manière, d’un ton qui non seulement émeuvent, mais aussi peuvent permettre à son œuvre d’échapper à la désuétude. L’œuvre d’art ne meurt pas totalement, elle peut vieillir d’un côté et rester actuelle par un autre.




IV- LA  CRÉATION  DE  LITTÉRAIRE.



1-LE  RÉALISME  ARTISTIQUE : L'IMITATION DE LA RÉALITÉ



            PLATON (428-348 Av J.C) dans La République soutien que l’artiste imite la nature. Pour cet auteur grec, l’artiste n’invente rien, il n’innove en rien. Tout ce qu’il peint, décrit ou écrit existe déjà quelque part, et à ce titre, l’art est une réminiscence des modèles contenus dans la nature. L’œuvre d’art est donc la copie plus ou moins conforme, le reflet de la nature. Les réalistes pensent   que   l’art   consiste   à   peindre   le   réel,   à   décrire  ou    présenter
les faits tels qu’ils sont. A l’arrière plan de cette thèse, se trouve l’idée que l’artiste par souci du vrai et du juste, doit être le témoin fidèle de sa société. Et STENDHAL, dont le vrai nom est Henri BEYLE (1783-1842), dira avec pertinence : « le roman est un miroir que l’on promène le long d’une route ». Il s’agit donc pour l’artiste de représenter la réalité sous ses divers aspects, sans toute fois essayer de l’embellir, de la modifier ou de la dénaturer.

            Notons tout de même que l’engagement est l’un des pendants du réalisme. S’engager c’est opter pour la contestation de ce qui est par le moyen de la description. Dans ce sens précis, Albert CAMUS disait : « Contester c’est constater pour construire ». L’engagement implique à cet effet que l’on pose les problèmes réels, que l’on décrive les faits concrets, et à cet effet Jean Paul SARTRE écrivait il y a quelques décades : « l’écrivain a choisi de dévoiler le monde et l’homme aux autres hommes ». L’artiste selon l’engagement n’est donc que le témoin objectif des événements de son époque.



2-L’IDÉALISME  ARTISTIQUE: LA FICTION, L’IMAGINAIRE



            HEGEL dans Esthétique réfute cette conception de l’art. A quoi bon « refaire une seconde fois ce qui existe dans le monde extérieur », s’interroge-t-il.. Une telle production ne serait-elle pas oiseuse, superflue ? Pourquoi représenter sur les tableaux ou dans les livres les scènes que nous connaissons déjà dans la réalité ? Or, la caractéristique fondamentale de l’œuvre d’art est le génie créatif, la capacité d’innover, d’inventer, de créer ou de produire l’original. Selon les créationnistes et les idéalistes, l’art n’imite point la nature, il crée des modèles qui n’existent pas, façonnent des œuvres originales qui sont le fruit de l’imagination créative de l’auteur. Nous comprenons dès lors pourquoi KANT affirme que « l’originalité doit être la première propriété de l’art ». Ainsi, l’art en tant qu’invention du beau exige un talent totalement « opposé à l’esprit d’imitation », ajoute KANT. Le réalisme est à l’engagement ce que l’idéalisme est au Parnasse. L’art engagé doit décrire le réel comme l’art pour l’art doit s’en passer pour produire des œuvres originales et belles en elles-mêmes. L’idéalisme se fonde sur l’idée d’après laquelle l’œuvre d’art est le fruit de l’imagination, une création ex-nihilo, c’est-à-dire qui n’a aucun rapport avec l’expérience, qui ne tire pas inspiration de la réalité.

Cependant, le réalisme peut-il se passer de l’imaginaire ? L’artiste peut-il vraiment créer à partir de rien ? Malgré leur opposition apparemment tranchée, il paraît que réalisme et idéalisme se côtoient mutuellement. 

       De l’avis de Roger CAILLOIS, « toute littérature participe d’une civilisation. Aucun livre ne sort directement des battements d’un cœur ». C’est pour ainsi dire que même dans l’œuvre la plus imaginaire qui puisse exister, se cache les marques de la société de son auteur ou celles de l’expérience personnelle de ce dernier. A tout prendre, réalisme et idéalisme s’imbriquent et sont plus ou moins présentes dans les courantes œuvres artistiques.




 
 


LE DIVORCE: SOLUTION OU POLLUTION SOCIALE?

          Le divorce est par définition la rupture légale du mariage, ce  Le divorce est par définition la rupture légale du mariage, ce qui implique au préalable que l'homme et la femme doivent être mariés officiellement. De nos jours, le phénomène de divorce gagne de plus en plus du terrain en Afrique. Au Cameroun, on a tendance à penser que la plus part des mariages sont juste des formalités qui se révèlent au moment des plaintes mutuelles relevées au sein du foyer. Cependant, le divorce est-il un fait qui pollue le climat social? Devrait-on au contraire penser que ce phénomène est une solution sociale aux unions sans conviction aucune et sans engagement réel? Face à cette question posée, la réponse ne coule pas de source, d'autant plus que pour certains le divorce est une option légitime alors que pour d'autres, divorcer c'est prouver son immaturité et son caractère volage. 
            L'époque de la dévotion amoureuse et de la consécration de l'intimité semble révolue. La culture positive jadis ancrée en Afrique s'est évaporée sous le poids violent et persistant du modernisme. De nos jours, matérialisme, calcul d'intérêts, jeux de positionnement, sont aux nombre des motivations extrinsèques qui guident les femmes, mais dans certains cas les hommes désireux de se marier. Du coup, les traditions se sont maquillées aux couleurs du capitalisme à outrance et de l'intolérance  maffieuse. Certaines tribus sont d'ailleurs réputées pour être les spécialistes du mercantilisme sentimental. Ainsi, pointe-t-on généralement du doigt les Eton, les bulu, les Ewondo, les Bassa, les Maka, pour ne citer que celles-là. Amour ou opportunité d'affaire? mariage ou business? comme disait l'anglais: "That is the question". 


               D'un côté, il y a l'immense bande de filles abandonnées sur la route des promesses d'amour ou de mariage, par quelques jeunes hommes abattus par les exigences exorbitantes de la dot; d'un autre il y a les vieilles filles qui se rendent compte du temps vite passé dans le "jeu de la vie"; et qui décident d'être à l'orée de leur ménopause de femmes gentilles.
                N'oublions pas la bande de ces gamines blasées par leurs 20 premières années de vie dans une pauvreté indescriptible, qui s'engagent "sentimentalement" pour le crépissage du mur principal de la maison familiale ou pour la réussite scolaire d'un cadet. Et la liste n'est pas exhaustive. Les jeunes anciennes villageoises qui découvrent Yaoundé ou Douala pour la première fois, et qui se rendent compte de ce qu'elles peuvent être courtisées. Là alors, c'est juré pour une prise en charge générale: on doit opérer les habitudes sans anesthésie parfois, pour corriger l'accident ou l'incident génétique. Cela a souvent l'air d'une mission accomplie quand l'argent qui rend toutes les femmes dociles pleut constamment. 
                  Le plus grave, ce sont ces filles qui se font appeler "BORN AGAIN", c'est-à-dire nées de nouveau. Elles se collent aux programmes de prière et de délivrance comme des sangsues, sucent les prophéties des pasteurs comme des abeilles, dansent et crient fort à l'arrivée d'un nouveau fidèle, surtout quand au moment de la présentation de ce dernier il déclare être fonctionnaire et célibataire. 
                 C'est dans ces conditions que le mariage gagne la scène théâtrale. Des fiançailles en éclairs, des préparatifs pompeux, des aveux de circonstance, une nuit de miel pour agrémenter le scénario. La suite chers invités, c'est au domicile conjugal, un à trois mois après, lorsqu'on se rend compte que le mensonge n'a pas de longues jambes ou quand on est fatigué de jouer un rôle mal choisi. S'en suit donc les querelles, les bras de fer, la distance, les nouvelles conquêtes, l'adultère, la haine, et plus tard l'envie de tout quitter. 
                 Le divorce est finalement convoqué. il est même invoqué, et certains vont jusqu'à croire qu'ils n'ont pas besoin de légalité pour claquer la porte. Il est toutefois important de noter que, parlant des responsabilités dans les ruptures de mariage, l'on ne saurait désigner uniquement les femmes. Les hommes excellent aussi bien que les femmes dans cette maladie séculaire de la chasse à l'intérêt et de l'immaturité au moment de se marier.
                Quant aux conséquences, vous les connaissez sans doute. pacte de confiance brisé, familles dissociées, enfants tiraillés, rancunes grandissantes, conflits liés aux biens, dégâts psychologiques, sorcellerie, mort même dans certains cas. 
                  Que pensez-vous du divorce? A qui devrait-on attribuer la faute? Devrait-on à chaque occasion en arriver là? Notre génération doit-elle légitimer cette pratique au détriment des valeurs jadis vantées chez nous? 

                                                               Arnaud BAKELAK
qui implique au préalable que l'homme et la femme doivent être mariés officiellement. De nos jours, le phénomène de divorce gagne de plus en plus du terrain en Afrique. Au Cameroun, on a tendance à penser que la plus part des mariages sont juste des formalités qui se révèlent au moment des plaintes mutuelles relevées au sein du foyer. Cependant, le divorce est-il un fait qui pollue le climat social? Devrait-on au contraire penser que ce phénomène est une solution sociale aux unions sans conviction aucune et sans engagement réel? Face à cette question posée, la réponse ne coule pas de source, d'autant plus que pour certains le divorce est une option légitime alors que pour d'autres, divorcer c'est prouver son immaturité et son caractère volage. 
            L'époque de la dévotion amoureuse et de la consécration de l'intimité semble révolue. La culture positive jadis ancrée en Afrique s'est évaporée sous le poids violent et persistant du modernisme. De nos jours, matérialisme, calcul d'intérêts, jeux de positionnement, sont aux nombre des motivations extrinsèques qui guident les femmes, mais dans certains cas les hommes désireux de se marier. Du coup, les traditions se sont maquillées aux couleurs du capitalisme à outrance et de l'intolérance  maffieuse. Certaines tribus sont d'ailleurs réputées pour être les spécialistes du mercantilisme sentimental. Ainsi, pointe-t-on généralement du doigt les Eton, les bulu, les Ewondo, les Bassa, les Maka, pour ne citer que celles-là. Amour ou opportunité d'affaire? mariage ou business? comme disait l'anglais: "That is the question". 


               D'un côté, il y a l'immense bande de filles abandonnées sur la route des promesses d'amour ou de mariage, par quelques jeunes hommes abattus par les exigences exorbitantes de la dot; d'un autre il y a les vieilles filles qui se rendent compte du temps vite passé dans le "jeu de la vie"; et qui décident d'être à l'orée de leur ménopause de femmes gentilles.
                N'oublions pas la bande de ces gamines blasées par leurs 20 premières années de vie dans une pauvreté indescriptible, qui s'engagent "sentimentalement" pour le crépissage du mur principal de la maison familiale ou pour la réussite scolaire d'un cadet. Et la liste n'est pas exhaustive. Les jeunes anciennes villageoises qui découvrent Yaoundé ou Douala pour la première fois, et qui se rendent compte de ce qu'elles peuvent être courtisées. Là alors, c'est juré pour une prise en charge générale: on doit opérer les habitudes sans anesthésie parfois, pour corriger l'accident ou l'incident génétique. Cela a souvent l'air d'une mission accomplie quand l'argent qui rend toutes les femmes dociles pleut constamment. 
                  Le plus grave, ce sont ces filles qui se font appeler "BORN AGAIN", c'est-à-dire nées de nouveau. Elles se collent aux programmes de prière et de délivrance comme des sangsues, sucent les prophéties des pasteurs comme des abeilles, dansent et crient fort à l'arrivée d'un nouveau fidèle, surtout quand au moment de la présentation de ce dernier il déclare être fonctionnaire et célibataire. 
                 C'est dans ces conditions que le mariage gagne la scène théâtrale. Des fiançailles en éclairs, des préparatifs pompeux, des aveux de circonstance, une nuit de miel pour agrémenter le scénario. La suite chers invités, c'est au domicile conjugal, un à trois mois après, lorsqu'on se rend compte que le mensonge n'a pas de longues jambes ou quand on est fatigué de jouer un rôle mal choisi. S'en suit donc les querelles, les bras de fer, la distance, les nouvelles conquêtes, l'adultère, la haine, et plus tard l'envie de tout quitter. 
                 Le divorce est finalement convoqué. il est même invoqué, et certains vont jusqu'à croire qu'ils n'ont pas besoin de légalité pour claquer la porte. Il est toutefois important de noter que, parlant des responsabilités dans les ruptures de mariage, l'on ne saurait désigner uniquement les femmes. Les hommes excellent aussi bien que les femmes dans cette maladie séculaire de la chasse à l'intérêt et de l'immaturité au moment de se marier.
                Quant aux conséquences, vous les connaissez sans doute. pacte de confiance brisé, familles dissociées, enfants tiraillés, rancunes grandissantes, conflits liés aux biens, dégâts psychologiques, sorcellerie, mort même dans certains cas. 
                  Que pensez-vous du divorce? A qui devrait-on attribuer la faute? Devrait-on à chaque occasion en arriver là? Notre génération doit-elle légitimer cette pratique au détriment des valeurs jadis vantées chez nous? 

                                                               Arnaud BAKELAK

LA PAUVRETE EST JUSQU'ICI LEUR SEUL PARTAGE

             

Dans ce témoignage, découvrez le quotidien de quelques êtres oubliés.

 

                        L'Afrique! Une terre de prodiges, un continent aux cultures et valeurs diverses, un monde de contrastes troublants, où le paradoxe de la misère a depuis des décades élu domicile. C'est ici qu'on retrouve les pays les plus diversifiés du point de vue des ethnies qui les composent, c'est aussi en Afrique qu'on connait les plus vieux gouvernements au monde, certains composés d'administrateurs qui tutoient paisiblement le siècle de longévité. 

                 J'ai parcouru les rues le matin d'un certain samedi du mois de novembre 2018, défiant lors d'une séance de Jogging les quelques collines qui mènent à l'université de Ngoa-Ekelle à Yaoundé. Un vieux sac vide sur lequel on a délicatement attaché le manche d'un parapluie, épuisé de déchirures causées par les nombreuses et diverses intempéries, soigneusement rafistolé de cent et un lambeaux de tissus de toutes sortes, Je les ai observés un instant. Ils étaient au nombre de trois: une fillette et deux garçons, âgés entre 10 et 12 ans. se tenant par la main. Ils cherchaient tous à traverser la route surexploitée à cette heure de la journée. Il n'était que sept heures par-là, pourtant les routes souffraient déjà du poids insolent des véhicules célébrant une nouvelle liberté qui se proclamait de temps à autre au moyen d'un coup de klaxon. 

            Les trois petits enfants attendaient toujours l'occasion de traverser la route. Je m'approchais, je leur dis un bonjour rassurant. "Je vais vous aider les enfants", j'ajoutais. Mais, leurs yeux ahuris me laissèrent croire qu'ils étaient davantage inquiets. Je lançais un autre "bonjour" qui ne reçut aucune réponse. Je pensai immédiatement que les petits ne comprenaient pas "ma langue". J'optai pour l'anglais. "Good morning dear kids", lançai-je. Ils me répondirent, un peu rassurés, mais timidement. "Ah, des enfants anglophones", fis-je intérieurement.

                Je leur proposai mon aide qu'ils acceptèrent. Alors, je leur fis traverser la route. Une fois à ce nouveau côté de la route, je leur demandai d'où ils venaient et où ils allaient. Ils me firent savoir qu'ils allaient au marché afin de trouver un moyen de travailler en tant que vendeurs ambulants. Ces Trois enfants, très tôt tous les matins, se rendent dans un marché de la place, se présentent à certains boutiquiers ou gérants de magasins. Ils doivent par la suite recevoir chacun un lot d'articles à transporter sur leurs têtes, qu'ils doivent vendre en serpentant toute la journée durant, les artères qui environnent le marché. Ils doivent affronter et les nombreux clients qui ne s'expriment qu'en français, humeur épidermique, et le soleil ou parfois la pluie, sans oublier la faim, car le but visé est de rentrer à la maison avec chacun 500 francs CFA environ, tous les soirs. Habités par un courage dont seul le ciel sait l'origine, les trois orphelins marchent, se retournent, s'arrêtent, proposent  leurs produits, parfois d'une voix affaiblie par le traumatisme dont ils sont victimes. Leur visage dit un peu de ce qu'ils subissent chaque jour, leur regard supplie la clémence de monsieur tout le monde, mais leur entourage est trop préoccupé à vivre, vivre chacun pour lui-même, vivre sans se soucier de ceux qui n'ont plus ni espoir, ni soutien, ceux qui n'ont autre choix que de survivre au rythme de l'instinct qui agit toujours en eux.  
               Ils sont originaires de la région du Nord-Ouest du Cameroun. Ils ont perdu là-bas leurs parents ainsi que leur sœur aînée. Une voisine ayant réussi à prendre contact avec leur tante installée à Yaoundé avait réussi à les expédier comme des vulgaires colis à la capitale par le biais d'un "Gros porteur". 

             Arrivés à Yaoundé, ils furent reçus, mais une nouvelle phase de leur misère les attendait. La tante qui les reçut souffre depuis trois ans d'un mal dont elle n'a pu guérir jusqu'ici. Femme solitaire, ancien commerçante, affligée par la brutale disparition des membres de sa famille du fait de la crise qui sévit dans les régions dites anglophones, elle ne peut plus vaquer à ses activités quotidiennes. Auparavant, elle avait la charge de soutenir sa défunte sœur ainsi que ses deux frères (tous décédés) dans le financement de l'éducation de leurs enfants respectifs. Elle, contrainte de payer le loyer (une chambre pour laquelle elle verse environ 12.000 Francs CFA chaque mois au propriétaire), n'a eu autre option que d'initier ses neveux à la pratique de la débrouillardise, afin de survivre en attendant la fin. 

                De quelle fin s'agira-t-il cependant? De la fin de sa vie ou plutôt de la fin de sa misère? Et si sa vie venait à prendre fin, que deviendraient les trois enfants? Ces orphelins qui n'ont jamais demandé à naître dans une zone anglophone, j'allais dire dans une région frappée par une crise inattendue? Comment et où vivraient-ils? Qui de la société et de l'ensemble des pouvoirs publics prendrait en charge leur destin? Qu'ont fait ces enfants au monde pour mériter toute cette galère? Pour l'instant, ils n'ont pour partage que cette pauvreté et cette tristesse qui les fait périr psychologiquement, amis aussi physiquement, un peu plus chaque jour. Ils ne connaissent plus depuis de nombreux mois le chemin qui mène à une école. Ils ont pris ce chemin, celui qui mène à l'école de la souffrance, au lendemain de l'incertitude et de la permanente résignation.   

                      De mon point de vue, notre gouvernement pourrait envisager le recensement des déplacés internes victimes de la crise anglophone, dans toutes les grandes métropoles où ceux-ci ont pu trouver refuge, afin d'envisager une réelle prise en charge de ces personnes qui ont tous besoin de notre attention, de notre aide, de notre amour. Cette initiative valoriserait sans aucun doute la politique  des grandes opportunités du président réélu.

                                                                       Sauvons l'harmonie sociale au Cameroun.

                                                                         Arnaud BAKELAK